La collection d’œufs Perrin de Brichambaut
Les oiseaux du Paléarctique
Lorsqu’à l’été 2007, Renaud Perrin de Brichambaut vint proposer au muséum la formidable collection d’œufs d’oiseaux du paléarctique qu’avait constituée son père Jacques, décédé la même année, le muséum était toujours fermé au public. L’ensemble du personnel était alors occupé par l’intégration de milliers d’objets dans les nouveaux espaces de l’exposition permanente. Pourtant, l’intérêt scientifique et historique de cette collection oologique de 920 taxons (espèces et sous-espèces) et de 15590 spécimens suscita immédiatement l’enthousiasme des naturalistes du muséum, et une demande d’avis auprès de la commission régionale d’acquisition de la DRAC fut déposée, conduisant à l’achat et à son inscription à l’inventaire du Muséum. Elle est venue ainsi compléter les anciennes collections d’œufs d’Adrien Lacroix, Gustave Cossaune, Maurice Gourdon et Tervuren. L’acquisition de la collection Jacques Perrin de Brichambaut porte dorénavent le nombre d’œufs conservés au muséum à près de 20000 spécimens.
Outre son importance numérique, en plus des collectes effectuées par Jacques Perrin de Brichambaut et ses enfants, cette collection rassemble une partie des collectes de grands noms de l’ornithologie française et internationale tels que René de Naurois, Jacques de Chavigny, Henri Heim de Balsac, Georges Guichard ou Wolfgang Makatsch.
La biographie de Jacques Perrin de Brichambaut
Né le 18 octobre 1920 à Paris, Jacques Perrin de Brichambaut s’est très vite passionné pour l’ornithologie qu’il pratiquera dès son enfance puis durant toute sa vie. Gravement blessé en 1944 au cours de la seconde guerre mondiale où il s’était engagé volontairement, il recevra la médaille militaire et la Croix de guerre. Sa brillante carrière dans le marketing et les études de marché ne l’empêchera pas de se spécialiser par la suite dans l’étude des comportements de nidification des oiseaux. Après avoir fondé une cellule d’études ornithologiques dans l’Oise avec Michel Deramond, il commencera à parcourir la France entière avec son ami ornithologue, Georges Guichard, pour observer les oiseaux. Au début des années cinquante, il est un des membres fondateurs de la première association scientifique ornithologique de terrain : le “Groupe des jeunes ornithologistes”, dont la revue Oiseaux de France paraîtra jusqu’en 1968 ; dans laquelle il publiera de nombreux articles, ainsi que dans la revue internationale d’ornithologie Alauda, repris depuis par son ami Jean-François Dejonghe. En 1956, il intègre le conseil de direction de la SEO (Société d’Études Ornithologiques) dont il sera plus tard l’un des principaux acteurs du rapprochement avec la SOF (Société Ornithologique de France), ce qui aboutira en 1993 à la naissance de la SEOF (Société d’Études Ornithologiques de France). Il en rejoint le conseil d’administration en 1994, qu’il animera jusqu’à son décès le 17 mars 2007 à Paris. Correspondant des plus grands collectionneurs français et étrangers en oologie, il constituera, grâce à ses échanges, l’une des plus remarquables collections d’œufs d’oiseaux de la zone paléarctique. Le fait qu’il épouse en 1947 la toulousaine Françoise Massol, avec qui ils auront six enfants, justifiera son souhait ainsi que celui de ses enfants, de proposer sa collection d’œufs et ses carnets au muséum d’histoire naturelle de Toulouse.
La période de collecte et la provenance des œufs
La période de collecte des spécimens de la collection Perrin de Brichambaut s’est étalée principalement entre 1908 et 1977, bien que certains œufs aient pu être collectés bien avant. C’est le cas notamment d’un œuf de tourte voyageuse ou pigeon migrateur, espèce aujourd’hui éteinte, car éradiquée par l’homme. Ce fameux spécimen collecté en 1849 a d’ailleurs fait la couverture du périodique international spécialisé en ornithologie Audubon en 2014. Il est bon de noter ici que le ramassage des œufs d’oiseaux sauvages est aujourd’hui strictement interdit.
Concernant la provenance des collectes de la collection Perrin de Brichambaut, elle concerne essentiellement la zone biogéographique du paléarctique (soit 1669 espèces d’oiseaux décrites), mis à part quelques spécimens exotiques issus du continent nord-américain comme la tourte voyageuse ou de l’hémisphère Sud (autruches, nandous, casoars, émeus, tinamous, manchots, coucou guira). Il est à noter que certains de ces œufs ont déjà été exposés lors de l’exposition temporaire de 2015 sur les 150 ans du MHNT, ou prêtés à d’autres muséums, comme ceux de vautour fauve et de colibri au muséum départemental du Var (Toulon) dans le cadre de l’exposition temporaire “Œuf” du 2 Octobre 2020 au 21 novembre 2021.
L’originalité de cette collection du paléarctique
La richesse de cette collection, outre son exhaustivité qui rassemble les principales formes, couleurs et motifs des œufs d’oiseaux1, tient également à la rareté de certaines pontes, du fait de l’espèce ou de la provenance. C’est particulièrement le cas de l’œuf du pétrel gongon ou diablotin du Cap-Vert, espèce qui ne niche que sur l’archipel du Cap Vert et dont le seul spécimen connu conservé dans un muséum serait celui collecté par René de Naurois en 1965 et intégré plus tard à la collection de Jacques Perrin de Brichambaut.
L’intérêt écologique de la collection
Enfin, au-delà de cette richesse taxonomique qui approche la diversité connue des espèces d’oiseaux du paléarctique, la centaine de pontes de coucou gris, Cuculus canorus, associée aux pontes des espèces de passereaux parasitées en font une collection également remarquable d’un point de vue écologique.
Mise en ligne de la collection Perrin de Brichambaut
Afin de ravir les amateurs ou spécialistes en oologie, une campagne photographique a été lancée depuis plusieurs années avec des prises de vue de chaque taxon (espèce et sous-espèce) de la collection pour être reversées sur wikimedia dans le cadre du projet Phoebus. Une fois achevée, cette base de données oologique pour le paléarctique constituera alors une exclusivité mondiale.
Remerciements
À Hervé et Renaud Perrin de Brichambaut, ainsi qu’à leur frère Vincent et leurs sœurs Patricia et Arielle pour la biographie de leur père, leur connaissance en ornithologie et pour leur confiance.
RÉFÉRENCES ET NOTES
1. Henri Cap et Charlène Verbeke “Les œufs d’oiseaux : Formes, couleurs et motifs, toute une histoire“. Parlons sciences, Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse. 2021.
EN SAVOIR PLUS
Photo. d’en-tête : Portrait de Jacques Perrin de Brichambaut, photo. : M. Souef et H. Perrin de Brichambaut – droits réservés.